Introduction
Penser l’action et penser dans l’action (proposition pour un thème commun)
Par Claire de Chessé, , responsable du chantier Philotravail et Eric Pezet, Professeur de sciences de gestion, Université Paris Ouest Nanterre La Défense
Une philosophie du management est-elle possible ?
Par Paul Griseri, Middlesex University, UK
La pensée la plus commune sur le management tend à le considérer comme une sorte d’objet. Faire des recherches sur celui-ci consiste en quelque sorte à le constituer comme objet, faire des investigations sur lui, analyser ses parties constitutives ou le décrire, tout ça dans l’espoir de rendre les affaires plus florissantes dans le futur.
En revanche, on accorde beaucoup moins d’attention au type d’investigation que l’on réalise quand on s’intéresse au management. Par exemple, on accorde peu de considération aux hypothèses que nous faisons lorsque que nous identifions un "business", ou quand nous essayons de dire ce que nous savons de lui et de son contexte, ou encore pourquoi nous faisons cela et pourquoi nous voulons que les affaires soient plus florissantes.
La philosophie du management doit apprendre de l’expérience des disciplines qui la composent. En éthique des affaires, les questions fondamentales ont été diluées et transformées en une « technologie douce » et en outils pour aider les managers à atteindre des objectifs organisationnels, subvertissant ainsi l’intention originelle des éthiciens des affaires de remettre en question l’orthodoxie du management.
Pour aider la philosophie du management à se développer sans succomber à l’appétit du monde des affaires pour de nouveaux outils, cette présentation abordera les trois questions fondamentales qui sous-tendent toute discussion philosophique, et qui devraient constituer la base de la discipline : Qu’est-ce que le commerce et le management ? Qu’est-ce que nous savons du commerce et du management ? Que devrions-nous faire en management ? (ces questions reflètent les trois parties de mon récent livre "Introduction à la philosophie du management"). Bien que certains problèmes suscités par ces trois questions soient déjà abordés dans l’étude des affaires et du management, leurs implications complètes n’ont pas été aperçues.
Philosophie française et management
Par Jacob Rendtorff, European Business Ethics Network, Ph.D, Mag. art. & Diplom Pol., Associate Professor, Department of Communication, Business and Information Technologies, Institut for kommunikation, virksomhed og informationsteknologier, Roskilde University, Danemark
Dans mon livre Philosophy of Management. A Perspective from French Philosophy and Social Theory je propose de lire des auteurs de la philosophie française contemporaine comme des contributions à la philosophie du management, c’est-à-dire à l’ontologie et à l’épistémologie de la gestion et de la gouvernance des organisations dans la société contemporaine. La thèse principale de cette communication soutient que les sciences de gestion et de gouvernance ont besoin de la philosophie française contemporaine pour développer leurs fondements théoriques, en particulier par rapport à la philosophie de l’organisation, de l’éthique et de la responsabilité sociale.
Condorcet’s perspective on human needs and knowledge implications for modern business management
Par Dr Christina Neesham, Department of Management, Monash University, Australia
The social project proposed by the Condorcet in his Esquisse d’un tableau historique des progrès de l’esprit humain (1793-1794) is underpinned by a complex conception of human progress, founded on the assumption of a set of universal basic needs, which integrate in perfect harmony knowledge, virtue, material well-being, liberty and equality. Within this conception, knowledge has the privileged status of universal means or absolute necessary condition, of endless benefit to all other dimensions of human fulfilment. Consequently, Condorcet’s theory of the good society provides a coherent framework for the development of evaluative criteria for today’s knowledge economy and its knowledge organisations.
Le leadership communicationnel des organisations dans les sociétés démocratiques
Øjvind Larsen, Copenhagen, Business School
Le concept de leadership communicationnel des organisations dans les sociétés démocratiques modernes est développé dans une perspective à la fois philosophique et de sociologie empirique. Le concept de leadership organisationnel est développé sur la base de la théorie de Cornelius Castoriadis de l’institution de l’imaginaire et de la théorie de Claude Lefort du "lieu vide". Cette perspective est approfondie à partir de la théorie de l’agir communicationnel d’Habermas dans lequel l’essentiel consiste dans la compréhension mutuelle des parties impliquées et où la perspective finale consiste en une démocratie qui garantit le droit à la liberté de parole. Cette théorie générale est reconstruite comme une théorie démocratique ou délibérative du leadership à travers une critique de la théorie de Max Weber sur la démocratie et le leadership.
Dans la perspective d’Habermas, le leadership devrait être essentiellement guidé par la compréhension mutuelle dans laquelle il devrait être spécifié des possibilités et des droits à la parole libre compte tenu des particularités de l’institution. D’un point de vue sociologique, le degré de leadership démocratique ou délibératif peut être testé à travers la possibilité d’une parole libre dans une institution donnée.
Key words: leadership délibératif, leadership communicationnel, leadership démocratique, liberté de parole, agir communicationnel.
13h30-16h00
Pour une ontologie historique des pratiques managériales
Par Luca Paltrinieri, Cirpp (CCI Paris Idf) / Collège International de Philosophie
L’œuvre de Foucault fait au moins depuis les années 1980 l’objet d’un intérêt croissant dans les champs des sciences de la gestion et d’histoire de l’entreprise et du management. En Angleterre, et plus récemment en France et aux USA, le fécond champ de Governmentality Studies se croisant avec celui de Critical Management Studies a donné lieu à un véritable déferlement d’études qui interroge le management contemporain à partir des concepts de discipline, de gouvernementalité, de techniques de soi. Notre objectif n’est pas seulement de faire l’état des lieux d’une influence, aussi grande qu’elle soit, mais de poser au moins deux questions à ces « usages » de l’œuvre foucaldienne. La première concerne ce qui reste de philosophique dans ces usages : « emporter » un concept dans un champ disciplinaire établi – en se servant dans la « boîte à outils » foucaldienne – suffit-il pour articuler philosophie et management ? Plus profondément, ce questionnement concerne le rapport entre la philosophie et les généalogies foucaldiennes, rapport qui impose de penser de façon non conventionnelle l’articulation entre une philosophie critique et les disciplines du management. La deuxième question est liée à la première : qu’est-ce que pourrait être une philosophie « critique » du management ? Il faudrait là éviter les deux écueils : d’un côté la simple dénonciation de la rhétorique managériale cachant la reconduction de la domination, de l’autre l’instrumentalisation de la philosophie afin de rationaliser et améliorer une démarche managériale qui demeure non problématisée. Nous insisterons, à cette fin, sur les notions de Auflkärung, d’ontologie historique, d’êthos philosophique afin de nous interroger sur la possibilité de mettre la réflexion historico-critique à l’épreuve des pratiques concrètes du management.
Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les organisations sans jamais oser le demander à Lacan
Par Gilles Arnaud, Professeur en psychologie organisationnelle, ESCP Europe et Bénédicte Vidaillet, Maître de Conférences, Université de Lille 1
Dans cette communication, nous exposerons la contribution d’une approche lacanienne à l’étude du travail, du management et des organisations. La théorie lacanienne du sujet constitue à cet égard une ressource essentielle pour le chercheur. La définition de l’inconscient comme discours de l’Autre et de la subjectivité comme extime par rapport au sujet, en relation avec la théorisation du lien social comme discours, aide en effet à surmonter quelques-unes des tendances intériorisantes et individualisantes pour lesquelles la psychanalyse a souvent été critiquée. Elle se révèle également très utile pour développer une approche critique du management et des organisations. Enfin, en mettant l’accent moins sur l’être humain en tant que tel, que sur le manque qui lui est inhérent, manque qui n’est pas une forme de vide nécessitant d’être comblé ou évacué, mais un espace où le sujet s’exprime comme désirant, cette approche permet de réinterroger le fonctionnement organisationnel dans son ensemble.
L’échange de connaissances au sein de communautés métier une lecture organisationnelle du don contre-don
Par Gwenaelle Grefe, Maître de Conférences, Université d’Angers
La communication suivante propose une lecture nouvelle de la théorie du don contre-don de Marcel Mauss, transposée dans l’univers de l’entreprise industrielle contemporaine et appliquée à l’échange de connaissances dites métier. Dans ce contexte où le don initial (la connaissance) procède d’un transfert de bien précieux et symbolique quand il contient déjà tant du donneur (sa mémoire métier), il semble stimulant d’interroger la présence puis les modalités d’application et de circulation de l’échange maussien, entre « gens de métier ». La diffusion d’un tel don se voit par ailleurs envisagée au sein d’une configuration plus vaste, celle de l’organisation toute entière où sont encastrées les interactions étudiées. Dès lors, nous sommes conduits à concevoir plusieurs questions. Tout d’abord, comment l’organisation industrielle, davantage définie par les transactions économiques et marchandes peut-elle abriter un échange alternatif et l’arbitrer ? Ainsi, peut-elle l’incorporer, sans chercher à le normaliser, ni détourner son esprit si particulier, puisqu’à la fois déterminé comme endogènement libre et obligé ?
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